Airbnb France : lendemains difficiles en perspective

By on 01/08/2017
Airbnb

Comme d’autres grandes métropoles en Europe et outre-Atlantique, Paris a, depuis plusieurs mois, décidé de durcir le ton face aux plateformes de location de courte durée comme Airbnb. Après avoir opté pour l’obligation d’enregistrement des loueurs, de nouvelles restrictions pourraient suivre si la situation ne change pas. D’autant que les géants du Web sont plus que jamais dans le viseur de Bercy et de Bruxelles…

Mardi 4 juillet, la mairie de Paris décidait d’appliquer le « décret Airbnb » du 30 avril 2017, qui impose aux hôtes de déclarer leurs biens mis en location sur les plateformes en ligne comme Airbnb, Abritel ou Homelidays. La capitale française est ainsi devenue la première des 11 villes françaises de plus de 200 000 habitants et des 123 communes de la proche banlieue parisienne concernées par la nouvelle mesure à avoir ratifié le texte, qui prendra effet le 1er décembre 2017.

La mise en place de ce numéro d’enregistrement a été adoptée à l’unanimité par les élus parisiens. Ce numéro permettra notamment de mieux contrôler l’activité des hôtes sur les sites de location entre particuliers, et ainsi savoir si ces derniers sont imposables — ils le sont dès lors qu’ils gagnent plus de 23 000 euros par an grâce à cette activité — et s’ils respectent bien le nombre maximum de nuitées (120) par an pour un bien.

Et dans la Ville Lumière, tout le monde s’accorde à dire que cette réglementation est plus que nécessaire : avec près de 2 millions de voyageurs comptabilisés sur les différentes plateformes en 2016, l’« Airbnbisation » de Paris transforme les quartiers touristiques en « Disneyland du logement », dénonce Alexandre Vesperini, élu LR du VIe arrondissement. « Les 100 000 annonces qui progressent à un rythme galopant ont déjà provoqué la baisse du nombre de logements dans la capitale, explique Ian Brossat, l’adjoint parisien au logement. Elles entretiennent la spéculation sur les prix de l’immobilier et les nuisances dans les copropriétés. »

Paris prêt à durcir le ton

Depuis 2012, 13 000 habitants ont dû quitter Paris à cause de la hausse des loyers, et 120 000 sont toujours en demande d’un logement, d’après l’élu. Pour renforcer l’encadrement des sites de location, le Conseil de Paris envisagerait ainsi de doubler le nombre de ses contrôleurs, qui ont déjà permis de régulariser 900 logements loués illégalement via des plateformes en ligne.

Mais ses membres souhaiteraient aller plus loin en réduisant la limite du nombre de nuitées à 60, comme c’est déjà le cas à Amsterdam. D’autres villes comme New York ont même interdit la location d’appartements entiers pour une durée inférieure à 30 jours, tandis que Berlin n’autorise que la location d’une seule pièce pour les utilisateurs des portails en ligne. Des initiatives dont la Ville Lumière pourrait être tentée de s’inspirer.

Et si l’avenir d’Airbnb et consorts s’assombrit passablement dans les grandes métropoles du monde, il est davantage menacé à l’échelle de la France, qui semble s’intéresser de près aux bénéfices du groupe californien sur le territoire hexagonal.

En 2016, la filiale française d’Airbnb n’a déclaré que 166 373 euros de bénéfices au fisc français. Une somme dérisoire comparée aux 65 millions d’euros de chiffre d’affaires que la plateforme a réalisé en France en 2015, mais qu’elle a réduit à moins de 5 millions grâce à une technique d’optimisation fiscale courante parmi les géants d’internet.

Pluie de sanctions fiscales sur les GAFA en Europe

Comme les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), la startup valorisée à 31 milliards de dollars l’an dernier acquitte une immense partie de ses impôts en Irlande, où les sociétés sont beaucoup moins taxées que dans l’Hexagone (12,5 % contre environ 30 %).

Et l’argumentaire est bien rôdé : l’activité française se réduit à du marketing, l’ensemble des transactions réalisées dans l’Hexagone passant par une filiale irlandaise ou hollandaise. En 2016, le fisc français a ainsi réclamé 356 millions d’euros à Booking pour avoir fait transiter son chiffre d’affaires aux Pays-Bas. Bercy est également engagé dans un important bras de fer avec Google, qu’il a condamné à rembourser 1,15 milliard d’euros d’arriérés l’an dernier.

La France n’est pas le seul pays d’Europe à s’attaquer aux montages financiers des multinationales du Web. Après le Royaume-Uni, qui a négocié un accord de 172 millions d’euros avec Google, c’est l’Italie qui a récemment sommé le groupe américain de régler 306 millions d’euros pour ses bénéfices générés sur le sol italien entre 2009 et 2013, mais déclarés en Irlande. En 2015, le fisc transalpin avait déjà convaincu Apple de lui signer un chèque de 318 millions d’euros pour les mêmes raisons.

Et le combat contre l’évasion fiscale s’est récemment étendu à l’Union européenne, qui a enfin réagi suite aux scandales LuxLeaks et Panama Papers. Le Parlement européen a ainsi adopté un projet de directive visant à une transparence accrue pour les entreprises dépassant 750 millions d’euros de chiffre d’affaires. Airbnb et consorts sont prévenus, l’évasion fiscale est plus que jamais dans le viseur des autorités françaises et européennes.

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